Prose XVII – Fragments

Je garde un souvenir très distinct des périodes de joie.

Des années légères liées à la présence d’une amie à mes côtés,

Un bonheur constant et simple, que rien n’altérait.

Cette enfance magnifique était nourrie par notre façon de vivre.

Nous n’habitions jamais la même ville plus de deux années.

Partir était une joie, aucune racine ne prenait corps

Cela ressemblait à l’aventure et à la liberté,

L’arrachement même restait léger !

A chaque étape, je rencontrai celle qui me comblerait ensuite,

Goûtant le bonheur d’être aimée.

Pas d’ancrage, quelques visages aimés, des Nomades cachés.

De ville en ville j’espérais cette simplicité amoureuse et trouvais le visage aimant de mon Autre.

Dans ce lieu protégé de l’amitié enfantine,

Un ciel immense qui me comblait de joie. C’était la vie même.

Puis, soudain, un nouveau départ

Je cherchai patiemment,

Ne rencontrai pas le visage enfantin de l’amour. Je désespérai.

Enroulée dans une solitude épaisse,

Empêchée dans un corps maladroit et gauche,

Emmurée en moi-même,

Proche de l’asphyxie.

Tout était devenu laid, la ville, mon corps, la maison que nous habitions, ma vie, en quelques mois,

à cause d’un visage que je ne trouvais pas !

Il fallait bien continuer de vivre, privée de tout

Exclue de joie,

Donnez- moi, par pitié, un petit bout de ce ciel coloré que j’aimais tant.

Suppliques demeurées muettes, qui dévastaient ma vie.

Sans Elle tout était désenchanté.

Où retrouver ce lieu doux de mon enfance,

Un homme aimant peut-il réinventer le paradis des premiers temps ?

Délicieuse illusion !

Les bras qui m’ont enlacée ?

Aussi enchanteurs qu’impuissants à guérir l’absence.

Leurs étreintes sincères ne coloraient pas mon ciel,

 Orangés et mauves s’effaçant dans le vent.

A cœur perdu, je cherchai d’autres bras

Espérant goûter l’éternité des corps emmêlés

 La joie d’un être ensemble à jamais,

Illusion suave et cruelle.

Pourtant je menais depuis l’enfance une vie d’errance,

Je savais !

Traces au cœur

Soifs au corps

Marques à vie